2021, année Napoléon !
Du 16 septembre 2021 au 6 mars 2022, le Musée de la Monnaie de Paris devrait mettre en place une exposition temporaire « sur les traces de Napoléon 1er à la Monnaie de Paris ». Il ne s’agit alors que l’un des très nombreux événements qui serait organisé tout au long de cette année pour rendre hommage au premier empereur des Français, mort à l’âge de 51 ans à l’autre bout du monde, sur l’île de Sainte Hélène le 5 mai 1821. En 2019, l’anniversaire des 250 ans de sa naissance n’avait pas donné lieu à beaucoup d’événements commémoratifs. La plupart des instances officielles, des musées, des historiens, des associations dédiées à Napoléon, ont attendu cette année pour organiser une multitude de conférences, d’expositions, de cérémonies officielles et publier plus d’une centaine d’ouvrages consacrés à l’empereur Napoléon 1er. Si beaucoup connaissent son parcours et continuent d’analyser son héritage politique et militaire, certains s’interrogent encore sur les circonstances de sa mort.
Un parcours incroyable
Napoléon est né en Corse dans une modeste famille d’origine italienne.
A sa naissance, le 15 août 1769, l’île ne fait partie du Royaume de France que depuis un an.
Lorsqu’il part étudier, en tant que boursier, à l’âge de neuf ans dans l’école militaire de Brienne, il ne parle pratiquement pas français et ses camarades se moquent de son accent corse.

A 19 ans, il est déjà lieutenant d’un régiment d’artillerie lorsqu’éclate la Révolution de 1789. S’illustrant à la bataille de Toulon en 1793, il obtient le grade de général à 24 ans puis il devient général en chef des armées chargées d’affronter l’Autriche en Italie du Nord à seulement 26 ans en 1796 ! Sa notoriété est telle que le Directoire préfère l’éloigner du pouvoir en lui confiant une expédition périlleuse contre les Anglais en Egypte en 1798. Il revient cependant à Paris en octobre 1799 et entend bien rétablir l’ordre face aux tentatives de coups d’Etat successifs des royalistes et des jacobins. Son frère aîné, Lucien, qui préside le Conseil des Cinq-Cent fait appel à lui puis à l’armée commandée par Murat pour prendre le contrôle de l’assemblée le 9 novembre 1799. Le 13 décembre, Napoléon fait adopter une nouvelle Constitution et devient à 30 ans, le Premier Consul d’un nouveau régime républicain : le Consulat. Ensuite, en l’espace de 4 ans il parvient à régler la plupart des problèmes qui affectaient la France depuis la veille de la Révolution. Tout d’abord, il fait adopter des lois pour restructurer l’administration française et rétablir l’ordre en créant, entre-autres, les préfets, les lycées ou le fameux « Code Napoléon » qui servira d’exemple à tous les codes civils adoptés en Europe et en Amérique au XIXe siècle. Pour mettre fin au désordre économique, il créé également les chambres de commerce, la Banque de France et le « Franc Germinal » dont les caractéristiques resteront inchangées de 1803 à 1914. Enfin, il met fin à tous les conflits internes, notamment avec les catholiques royalistes en signant le Concordat avec le pape en 1801 et externes, en imposant des traités de paix avantageux aux Autrichiens la même année puis aux Anglais l’année suivante. Une telle réussite lui permet d’être plébiscité par le peuple et le Sénat pour devenir l’Empereur des Français,
couronné par lui-même en présence du pape dans la cathédrale Notre Dame de Paris le 2 décembre 1804.
Dans les années qui suivent, il parvient même à imposer plusieurs membres de sa famille et de son entourage à la tête de l’Espagne, de Naples, de la Hollande et de la Westphalie. Tous les princes d’Europe Centrale le craignent depuis leurs défaites successives à Austerlitz et à Iéna en 1805 et en 1806 et tout semble alors lui réussir lorsque sa deuxième épouse, Marie-Louise d’Autriche, lui donne un fils et donc un héritier impérial en mars 1811.
La déchéance du maître de l’Europe
En 1812, Napoléon estime intolérable l’attitude de défiance du Tsar de Russie, Alexandre 1er, alors encouragé à la guerre par l’Angleterre qui soutient également depuis 1807 des révoltes contre les alliés de Napoléon en Espagne et au Portugal. L’Empereur réunit alors une formidable coalition forte de 600 000 hommes pour envahir la vaste Russie depuis le duché de Pologne. La « Grande Armée » parvient à Moscou le 13 septembre 1812 mais la ville a été abandonnée et incendiée. A cours de ravitaillement, l’Empereur doit se résigner à rentrer sans avoir obtenu de victoire décisive, mais il est déjà trop tard, l’hiver russe s’installe et décime l’armée napoléonienne. Vaincu par le froid, la boue, le typhus, la famine et le harcèlement des troupes de Koutouzov, seuls 10% de la grande armée parviennent en Pologne.

Affaibli, l’empire de Napoléon est alors une proie idéale pour une nouvelle coalition de souverains avides de revanche. Ainsi, les Russes, les Autrichiens, les Prussiens, les Suédois et les Anglais forment une grande alliance anti-Napoléon en 1814. Après avoir vaincu l’armée française à Leipzig, ces derniers parviennent à envahir le Nord de la France et à prendre Paris le 31 mars 1814. Napoléon choisit alors de négocier sa reddition pour sauver l’indépendance de la France.
Il abdique le 6 avril et selon les termes du traité de Fontainebleau signé le 11, il conserve son autorité sur un minuscule territoire, l’île d’Elbe,
tandis que l’Autriche, conformément à sa promesse de 1792, rétablit la monarchie en plaçant Louis XVIII à la tête d’un royaume de France réduit à ses frontières de 1789. Pendant son exil, Napoléon ne manque pas de se tenir informé des décisions prises à Paris et en Europe. Il s’inquiète notamment du sort réservé à sa femme et à son fils, détenus en Autriche sous la protection de l’Empereur François 1er qui le traite comme l’un de ses fils et lui laisse son titre honorifique de prince de Parme. Bientôt, le gouvernement royaliste refuse de lui verser la pension promise et envisage de négocier avec la Grande-Bretagne une mesure d’éloignement. Informé, Napoléon choisit de prendre de cours le Roi Louis XVIII en s’enfuyant discrètement de l’île d’Elbe pour débarquer à Golfe Juan le 1er mars 1815. Ainsi, moins d’un an après son abdication, il entame une remontée sur Paris qu’aucune troupe royaliste ne parvient à stopper. La plupart des militaires ayant combattu à ses côtés, ils préfèrent se retourner contre leurs officiers royalistes et rejoindre l’armée de Napoléon. En apprenant la nouvelle, le Roi Louis XVIII préfère ne pas prendre de risque et s’enfuit à nouveau en Autriche pour avertir ses alliés. Le 20 mars, Napoléon est aux Tuileries mais il sait déjà qu’il doit rapidement réorganiser son armée pour affronter celles de la coalition avant qu’elles n’opèrent une jonction et envahissent de nouveau la France. Il confie alors à Grouchy le soin d’écraser l’armée prussienne de Blucher à l’Est tandis que Ney doit stopper le corps expéditionnaire anglais de Wellington au Nord. Le 18 juin, cette tactique échoue et l’armée française doit affronter les deux armées à Waterloo. Après 10 heures de combat, c’est la débâcle. Napoléon rentre à Paris le 21 et choisit d’abdiquer à nouveau, au profit de son fils, qu’il proclame Empereur des Français sous le nom de « Napoléon II » en son absence le 22 juin. Il envisage ensuite de s’enfuir en toute discrétion pour embarquer à Rochefort sur un navire devant l’amener en Amérique. Déguisé en marchand, il prend la route en calèche sans escorte et arrive à Fouras où l’attendent deux frégates, la Méduse et la Saale à bord de laquelle il embarque le 8 juillet 1815. Malheureusement, Fouché, le président du gouvernement provisoire a eu vent de ses plans et alerte les autorités britanniques qui envoient des navires de guerre au large de Rochefort. Piégé, Napoléon est contraint de négocier en refusant l’offre de ses officiers qui lui proposent de sacrifier la Méduse pour permettre à la Saale de tenter de passer. Il demande donc l’asile politique au gouvernement anglais et espère un procès et un traitement équitable en Angleterre et c’est donc en toute confiance qu’il embarque sur le vaisseau de guerre le Bellerophon. Hélas, les autorités britanniques ne souhaitent pas lui laisser une chance d’invoquer « l’habeas corpus » pour obtenir un exil doré en Angleterre, ce qui ne manquerait pas de provoquer la colère des royalistes français. C’est donc un tout autre sort qui lui est réservé.
Déporté au milieu de l’Atlantique

Le 7 août 1815, Napoléon est transféré sur un autre navire de guerre, le Northumberland, qui a pour mission de le déposer sur l’île de Sainte Hélène au beau milieu de l’Atlantique Sud à quelques milliers de kilomètres des côtes africaines et américaines. Cette île stratégique sur la route des Indes qui contourne alors l’Afrique est une véritable forteresse régulièrement ravitaillée et fréquentée par les navires anglais qui y font escale depuis 1659. Napoléon a été autorisé à désigner les fidèles qui pourront l’accompagner en exil. Il a donc choisi trois officiers, le grand maréchal Bertrand, le général Montholon et le général Gourgaud, un secrétaire particulier, le comte de Las Cases, un valet de chambre, un maître d’hôtel, un chirurgien et quelques domestiques. Débarqués le 16 octobre 1815, ils sont tous installés dans une vaste maison de maître, à Longwood, sur les hauteurs de l’île volcanique tandis que 1500 soldats anglais supplémentaires viennent compléter la garnison en prévision d’une éventuelle tentative de libération par des forces impérialistes. Le gouverneur de l’île, Sir Hudson Lowe, ordonne d’ailleurs que l’empereur déchu soit accompagné en permanence, quelle que soit son activité. Napoléon, habitué à l’agitation politique et militaire sombre alors progressivement dans la dépression et la maladie. Il essaye cependant de passer le temps en prenant des cours d’Anglais et surtout en dictant l’écriture de ses mémoires et de sa version personnelle de l’histoire récente de l’Europe dans laquelle il a joué le rôle principal. C’est le comte de Las Cases qui se consacre à cette tache mais il est expulsé de l’île à la fin de l’année suivante car il est soupçonné de tenter de correspondre secrètement avec Lucien Bonaparte, le frère de Napoléon, via l’entremise d’une amie d’origine angevine, mariée à un officier anglais, Lady Clavering. En 1818, ce dernier, qui n’a pas été autorisé à retourner en France, présente une pétition au Parlement britannique pour tenter d’obtenir l’organisation d’un procès légal en Angleterre et donc une possibilité de retour d’exil… mais cela n’aboutit pas. A partir de 1819, l’état de santé de l’empereur se dégrade et il fait venir un médecin de Corse pour le surveiller car il se méfie des chirurgiens anglais qui ont été désignés pour le soigner. D’ailleurs, quand il parvenait à nouer des liens de sympathie avec certains comme le docteur Stokoe ou le médecin irlandais O’Meara, ces derniers étaient aussitôt rapatriés en Angleterre à la demande du gouverneur. C’est donc le docteur Francesco Antommarchi qui accepte le contrat d’embauche le 19 décembre 1818 mais ne prend en charge Napoléon à Saint Hélène qu’à partir du 19 septembre 1819 après une longue pérégrination via l’Italie et l’Angleterre et quelques tracasseries administratives de la part des autorités londoniennes. Ce Grand Maître des Université Impériales est alors un spécialiste de la dissection mais il n’est pas vraiment réputé pour ses qualités de médecin traitant. A son arrivée, le docteur corse ne cache pas à l’empereur la gravité de son état de santé et ce dernier sait bien qu’il pourrait mourir des mêmes problèmes digestifs que son père et sa sœur auparavant, tous deux victimes d’un cancer de l’estomac. C’est pourquoi il ordonne à Antommachi d’effectuer une autopsie aussitôt après sa mort, avec pour objectif de trouver un éventuel traitement pour son fils, s’il s’agit bien d’une maladie génétiquement transmissible.
Les circonstances de sa mort

En mars 1820, Napoléon ressent une forte douleur dans le ventre et pense que sa fin est proche. Les médecins qui l’entourent suivent alors jour par jour l’évolution de son état de santé qui se dégrade. Jusqu’à lors, les médecins anglais n’avaient indiqué que des crises passagères : une douleur aigüe en octobre 1817, décrite par le docteur O’Meara et des « douleurs cruelles du côté droit » détaillées par le docteur Stokoe en janvier 1819. A partir d’octobre 1820, l’état de santé se dégrade tellement que Napoléon est de moins en moins capable d’effectuer les tâches les plus anodines du quotidien. En janvier 1821, Antommachi, dont les soins inadaptés et les absences régulières sont de plus en plus critiqués par l’entourage de l’empereur et Napoléon lui-même, demande à quitter l’île pour ne pas porter la responsabilité de sa mort. Ce dernier lui interdit d’ailleurs l’accès à sa chambre et demande à être suivi désormais par le docteur anglais Archibald Arnott. Entre le 14 et le 16 mars, l’empereur entre progressivement dans une somnolence léthargique et peine à s’alimenter sans vomir. Il retrouve un peu de force le 9 avril sous le coup de la colère contre Antommachi à qui il reproche de ne jamais arriver à l’heure et de « passer son temps chez Madame Bertrand » la femme du général. Il précise alors qu’il souhaite corriger son testament pour léguer « à Antommachi vingt francs pour acheter une corde pour se pendre » ! Le 16 avril, plus sérieusement, il ajoute un amendement à son testament pour demander que « ses cendres reposent sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français que j’ai tant aimé » et pour préciser qu’il lègue une partie de sa fortune et de son argenterie à ses derniers compagnons de Sainte Hélène. A partir du 24 avril, on ne parvient plus à l’alimenter sans qu’il vomisse et le 30 avril, Antommachi est contraint de rester de veille permanente dans la salle à manger en attendant la fin qui est proche. Le docteur Arnott confirme qu’il n’y a aucun espoir. Le 2 mai, Napoléon commence à délirer et à évoquer son fils, la France ou ses compagnons d’armes sans parvenir à structurer ses idées avec clarté. Le 3 mai, le docteur Arnott lui prescrit une forte dose de calomel, du chlorure de mercure, pour calmer la douleur alors qu’elle ne fera qu’accélérer l’hémorragie stomacale. La nuit du 4 au 5 est extrêmement agitée et l’empereur délire de plus en plus. Ses derniers mots sont d’ailleurs l’objet de débat car aucun témoin ne parvient à rapporter exactement ses dernières paroles qui seraient « tête », « armée » ou « France » ou « Mon Dieu » ou « Mon fils » ou encore « Joséphine ». A 17h49, le samedi 5 mai 1821, l’empereur Napoléon est mort à l’âge de 52 ans et dès le lendemain, conformément à ses vœux et avec l’accord du gouverneur Hudson Lowe, le docteur Antommachi procède à la dissection du cadavre en présence de 5 médecins anglais, des compagnons d’armes de l’empereur qui ont été désignés comme exécuteurs testamentaires et d’une poignée d’officiers d’Etat-Major de la couronne britannique. Sir Hudson déclare alors que l’Angleterre vient de perdre son plus grand ennemi mais qu’on ne pouvait éprouver que de la douleur et des regrets devant la perte d’un si grand homme. L’autopsie du 6 mai donne lieu à 3 rapports. Un rapport officiel destiné aux autorités anglaises est rédigé par les médecins anglais Shortt et Arnott. Antommachi refuse leurs conclusions et choisit de rédiger un deuxième rapport qu’il fera parvenir à l’épouse de l’empereur à son retour en Italie. Enfin, Henry Walter, le chirurgien du régiment est chargé de prendre des notes pour décrire le déroulement de l’autopsie elle-même. Les trois rapports décrivent la présence de multiplies ulcères à l’estomac et d’une perforation circulaire bouchée par le lobe gauche du foie. La cause de la mort semble alors être la tumeur, désignée sous le nom de « squirrhe gastrique » interprétée comme un « cancer de l’estomac ». Cette thèse permet aux autorités britanniques d’éloigner toute hypothèse de mauvais traitements ou même d’empoisonnement à l’égard de leur pire ennemi de l’époque. Cette dernière hypothèse est d’ailleurs réapparue dans les années 1960 à partir de l’analyse de différentes mèches de cheveux de Napoléon dans lesquelles sont détectées des traces d’arsenic suffisante pour entrainer une mort lente. La plupart des médecins actuels considèrent que cette thèse ne tient pas car il est démontré que la population de l’époque était fréquemment exposée à l’arsenic dans les médicaments et dans les teintures utilisées alors. D’après les historiens spécialistes de Napoléon, ce dernier serait tout simplement mort d’ennui et de chagrin qui n’auraient fait qu’aggraver son ulcère à l’estomac provoquant une péritonite fatale. Après son autopsie, l’empereur est recousu après que l’on ait retiré son cœur et son estomac. Il est ensuite habillé avec l’uniforme de colonel des chasseurs à cheval de la Garde Impériale orné de toutes ses décorations reçues pendant son règne. Son grand manteau bleu, qu’il portait à la bataille de Marengo, lui fait office de drap mortuaire tandis que l’on lui remet son épée, son chapeau et un crucifix. Il est veillé par ses compagnons et une garde d’honneur anglaise jusqu’au 9 mai avant d’être porté en calèche dans son cercueil jusque dans son lieu d’inhumation : sur le terrain de la propriété, à proximité d’une source qu’il affectionnait dans la vallée dite du géranium, rebaptisée ensuite, « vallée du tombeau ». Son vœu d’être rapatrié pour être enterré à Paris ne fut donc pas exaucé, le Roi Louis XVIII ne souhaitant pas voir son tombeau devenir un lieu de recueillement et un symbole de ralliement pour les impérialistes. D’ailleurs, les Français n’apprendront la mort de leur empereur que près de deux mois plus tard. En effet, la dépêche envoyée par Hudson le 7 mai ne parvient par bateau à Londres que le 3 juillet et l’information n’est transmise au roi de France que le 5. Il faut donc attendre le 6 juillet au matin pour que les journaux parisiens reprennent le « Courrier de Londres » pour en informer les Français. La plupart apprennent cette nouvelle avec indifférence car beaucoup ont souffert de la perte d’un proche dans les combats napoléoniens ou de la ruine économique entrainée par sa défaite.
Retour triomphal du défunt et renaissance du Bonapartisme
La publication du « Mémorial de Sainte Hélène » par le comte de Las Cases en 1823 remporte pourtant immédiatement un succès éditorial considérable en France. Le docteur Antommachi en profite pour lui aussi publier une version améliorée de son temps passé sur l’île de l’exil et de son compte-rendu d’autopsie en 1825 sous un titre accrocheur « Les derniers moments de Napoléon », ouvrage qui se révèle être en grande partie entaché d’approximations au détriment des médecins anglais, de mensonges en sa faveur et d’exagérations. Dans le même temps, de nombreux auteurs européens semblent inspirés par l’illustre personnage qu’ils ont admiré ou au contraire détesté. Ainsi, Victor Hugo le décrit comme un « Prométhée » des temps moderne tandis que Balzac, Stendhal ou Musset en France ou Dostoïevski et Tolstoï à l’étranger, aiment à considérer la période impériale comme le contexte de l’intrigue de leurs œuvres. Dix-neuf ans après la mort de Napoléon, le Roi Louis-Philippe, qui vient de prendre le pouvoir à l’occasion de la Révolution des Trois Glorieuse, souhaite s’assurer le soutien des impérialistes, très présents dans l’armée, l’administration et la paysannerie soucieuse d’ordre face aux monarchistes et aux républicains. Il demande alors à son conseiller, Adolphe Thiers, de négocier avec le Royaume-Uni pour obtenir la restitution des cendres de l’ex-empereur.
L’exhumation du corps de Napoléon a lieu le 15 octobre 1840, puis, le 18, il est rapatrié en France sur la frégate La Belle Poule jusqu’à Cherbourg.
Le fils du fidèle comte, Emmanuel Pons de Las Cases, participe à l’expédition pour rapporter les cendres de Napoléon en France. Le 15 décembre 1840, les restes de l’empereur sont rapatriés à Paris et transférés en grande pompe à travers la ville, au milieu d’une foule de près d’un million de Français, jusque dans son majestueux sarcophage de porphyre rouge digne d’un empereur romain, placé sous la vaste coupole du dôme des Invalides. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, cet hommage populaire semble réveiller chez les Français la nostalgie de la grandeur impériale et ils soutiennent par référendum le coup d’Etat de son neveu, Louis Napoléon Bonaparte, qui met fin à l’éphémère Troisième République le 2 décembre 1851 pour restaurer un « Second Empire » le 2 décembre 1852, dates anniversaires du sacre de Napoléon 1er son oncle. Ainsi, à partir de 1854, l’empereur Napoléon III négocie à nouveau avec le gouvernement britannique l’achat de Longwood House et de la vallée du Tombeau. Il en obtient la propriété en 1858 tandis que l’île de Sainte Hélène perd de son intérêt stratégique sur la route africaine des Indes avec les travaux de percement du canal de Suez qui ont commencé avec l’accord du gouverneur d’Egypte en 1854. Les « Domaines français de Sainte-Hélène » sont donc gérés depuis par le Ministère des Affaires étrangères avec un représentant sur place portant le titre honorifique de « Consul honoraire, conservateur des Domaines français de Sainte-Hélène ».
Un bicentenaire très chargé malgré la pandémie
Tous les 5 mai, une cérémonie officielle est organisée à Sainte Hélène en présence du consul honoraire de France autour du premier lieu de sépulture de l’empereur tandis qu’une gerbe de fleurs est déposée devant son tombeau des Invalides en présence du Gouverneur militaire de Paris, du Gouverneur des Invalides, des descendants de la famille impériale et de représentants de la Fondation Napoléon qui entretient sa mémoire avec ferveur. Mais cette année est plus exceptionnelle, et cette commémoration du bicentenaire de la mort de Napoléon offre l’occasion d’organiser un très grand nombre d’événements, pas seulement en France, mais aussi à Waterloo en Belgique, à Sainte Hélène ou même au Chili ou l’on rend hommage à sa contribution pour l’indépendance. Presque tous les mois, un colloque, une exposition ou des conférences sont proposés dans les différents lieux historiques associés à la mémoire de Napoléon comme Fontainebleau, Vincennes, Rueil-Malmaison, la Roche-sur-Yon, Ajaccio, Saint Raphaël ou l’île d’Aix. Les gouvernements chiliens, polonais, italiens, belges et roumains organisent également des expositions consacrées au personnage illustre ou au mythe de Napoléon. Dans Paris, aux Champs-Elysées et aux Invalides, si les restrictions liées au COVID le permettent, des défilés en costumes d’époque devraient avoir lieu ainsi que des concerts et des expositions. Les films documentaires vont également fleurir à la télévision tandis qu’une bonne centaine d’ouvrages sont annoncés en librairie. L’exposition la plus importante devrait avoir lieu au Grand Palais de La Villette mais l’Hôtel des Invalides et le château de Fontainebleau n’auront de cesse de rivaliser en ponctuant l’année de conférences, de pièces de théâtre, d’expositions et de concerts. Les Archives nationales, la Bibliothèque Nationale de France et le Musée de l’Armée prévoient également de proposer leurs propres expositions à partir de leurs archives. Enfin, le Musée de la Monnaie de Paris organisera sa propre exposition du 16 septembre 2021 au 6 mars 2022 sous le titre « Sur les pas de Napoléon 1er à la Monnaie de Paris ». Elle devrait réunir sans doute les plus belles pièces dédiées à l’empereur Napoléon 1er et à son héritage monétaire car depuis sa réforme monétaire du 27 mars 1803, qui donne naissance au Franc Germinal, toutes les pièces frappées en France affichent le buste de l’empereur sur l’avers tandis que la pièce d’or de 20 Francs a pris son nom, encore utilisé aujourd’hui : le « Napoléon ».
Ce dernier s’était d’ailleurs rendu sur place, quai Conti, le 12 mars 1803 pour superviser la mise en place de sa réforme.
Cette exposition devrait aussi revenir sur le travail « artistique, technique et scientifique de la Monnaie de Paris sous le Directoire, le Consulat et l’Empire » puis sur son rôle dans la « diffusion de la légende napoléonienne sous la Monarchie de Juillet et le Second Empire ». Cinq thèmes seront abordés : les principaux graveurs, l’évolution stylistique de l’effigie de Napoléon et la propagande impériale, la figure héraldique et symbolique de l’Aigle impérial, les visites diplomatiques à la Monnaie de Paris et enfin, les médailles issues de la création de l’ordre de la Légion d’honneur.