Trouver un trésor perdu semble être un mythe. Mais l’actualité montre régulièrement que c’est, presque au quotidien, une réalité. Et ils sont nombreux à parcourir la campagne avec des instruments de détection plus ou moins sophistiqués, avec une seule idée en tête : découvrir le trésor caché depuis des siècles dans un sous-bois, entre deux murs ou dans le sable. Or, si l’usage des détecteurs réserve bien des plaisirs, il offre également bien des surprises. Pour autant, cette passion doit s’inscrire dans un cadre législatif et réglementaire que tout prospecteur doit connaître et respecter. En France leur vente est parfaitement légale mais leur usage est sinon quasi interdit, du moins soumis à des règles très strictes, ce qui n’est pas le cas chez nos voisins britanniques par exemple.
LE CADRE LÉGISLATIF
C’est la loi du 18 décembre 1989 (en complément des règles édictées par la loi du 27 septembre 1941 en matière de fouilles) qui détermine l’utilisation des détecteurs de métaux. Son article 1er en précise le cadre : Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d’objets métalliques à l’effet de recherches de monuments et d’objets pouvant intéresser la préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie, sans avoir préalablement obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de recherche. Les mesures d’application de cette loi ont été publiées dans le décret d’application du 19 août 1991. Mais ce texte a été abrogé par l’ordonnance du 20 février 2004 qui pose la partie législative du code du patrimoine, qui dans son article L.542-1 reprend le texte de 1989. Attention ! Les peines encourues sont, tout de même, à minima, de 7 ans de prison et de 100.000 euros d’ amende.

Ces mesures sont destinées à préserver l’intégrité des niveaux archéologiques des sites contenant des objets métalliques car l’intérêt scientifique de ces objets est en grande partie lié à leur contexte stratigraphique et archéologique. Les plus beaux objets perdus sont des témoins muets lorsqu’ils n’ont pas été mis au jour dans le cadre rigoureux d’une fouille archéologique. Seules des fouilles scientifiques et méthodiques peuvent ainsi en apprécier la valeur, en particulier en matière de datation. De facto, l’utilisation d’un détecteur de métaux sans visée archéologique ou historique n’est
soumise qu’à l’autorisation du propriétaire du terrain.
DÉFINITION ET LÉGISLATION SUR LES TRÉSORS
Mais comment définir la notion de trésor ? C’est l’article 716 du code civil qui le définit : un trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le propre fruit du hasard. La question est donc moins liée à la question de quantité ou de métal, qu’à celle de « hasard ». La prospection archéologique avec un détecteur de métaux peut-elle être considérée comme un hasard ? En application du même article, cette découverte appartient légalement pour moitié à celui qui le découvre et au propriétaire du terrain sur lequel il est trouvé. Mais l’Etat peut retenir ce trésor pendant un durée maximale de 5 ans pour fin d’étude scientifique. En cas de cession, il peut également faire valoir ses droits de préemption.
OÙ TROUVER DES TRÉSORS ?
La « chasse au trésor » attire de plus en plus d’adeptes. Il existe donc de nombreuses publications périodiques et des associations diverses. Un amateur éclairé, Didier Audinot, a publié de nombreux ouvrages sur ce sujet : « Chasse au trésor en Normandie », « Tous les trésors de France », « Astuces et secrets d’un chasseur de trésor »… En fait, pour l’essentiel, les plus importantes découvertes de trésors ont été réalisées lors d’aménagements ou de travaux dans des maisons, mais surtout lors des grands travaux réalisés par le compte de l’Etat, en particulier d’autoroutes ou de chemin de fer.
Ainsi, la construction des tronçons de l’A5 (Melun – Troyes) ou de l’A160 (liaison A5/RN6) ont donné lieu à la découverte et la fouille de 43 sites archéologiques importants, dont 6 ont fourni des
monnaies. Le plus spectaculaire fut, sans nul doute, la découverte du site de Saint-Denis-les-Sens, un échangeur auto-routier dans la vallée de l’Yonne. 242 monnaies d’or gauloises globulaires y ont été mises au jour, du Ier siècle avant J-C. Une des plus importantes découvertes de ce genre.
ET LES ÉPAVES ?
C’est encore plus compliqué que sur terre. Avec la loi de 1961, l’inventeur (découvreur) pouvait remonter ses trouvailles et les conserver. Depuis 1989, « tout bien présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique » situé dans la limite des 25 milles nautiques des côtes est considéré comme « bien culturel maritime ». Il appartient donc à l’Etat sauf si on peut en identifier son propriétaire (quasi impossible). Une exception : s’il s’agit d’un navire militaire étranger, sa propriété reviens à son pays d’origine. Donc, en cas de découverte de « bien culturel maritime » il est impératif de le laisser en place et de le déclarer sous 48 heures. Seule une autorisation de la Direction des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines pourra
permettre de poursuivre.
ET SUR LES PLAGES ?
Ils sont nombreux ceux qui, le soir ou au petit matin, arpentent nos plages détecteurs en main. Il existe même des matériels spécifiquement adaptés à ce milieu, y compris des sandales-détecteur ! Le plus souvent, leurs trouvailles se limitent aux objets métalliques « oubliés » (capsules, papier aluminium, canettes…) ou perdus (montres, bijoux, pièces de monnaie, clés…). Mais ce passe-temps peut parfois s’avérer dangereux lorsque lesdites plages ont été le théâtre de combats (comme celles de Normandie). On peut se retrouver nez à nez avec des munitions non explosées qui pourraient réserver de désagréables surprises.
Il est à noter que la prospection sur les plages est souvent encadrée par un arrêté municipal. Songez à vous renseigner avant de commencer pour éviter une amende ou même la saisie du matériel. De plus, découvrir des objets de valeur perdus oblige à effectuer les formalités nécessaire : déclaration à la police ou la gendarmerie, voire même dépôt de ces objets.
LA POSITION DES ARCHÉOLOGUES
Le Conseil National de la Recherche Archéologique a rendu un rapport au ministre de la Culture sur ce sujet en février 2011. Ils sont massivement contre et ont, d’ailleurs, organisé les 12 et 13 mars 2013 une table ronde à l’Université de Toulouse-le-Mirail sur le thème « Halte aux pillages : une menace réelle pour notre patrimoine archéologique » (travaux publiés par les éditions Errance). Là encore, les positions sont un peu compliquées à comprendre. Les trois thématiques qui y ont été développées en sont la preuve : « chasses au trésor », « outils et moyens d’action » et « une collaboration est elle possible ? ». Ce dernier thème visait à définir les liens potentiels avec certains prospecteurs utilisant les détecteurs de métaux dans le cadre d’une collaboration, pratique finalement assez répandue dans le milieu des archéologues.