Après sept années de guerre civile, l’économie syrienne est à l’agonie. Le clan Assad s’accroche au pouvoir et semble en passe de l’emporter sur ses adversaires avec le soutien de la Russie et de l’Iran mais le dictateur président Bachar Al Assad ne règne plus que sur un tas de ruines et une population encore très divisée malgré l’épuration religieuse et idéologique issue du conflit. Le gouvernement syrien n’est plus vraiment maître de son destin et les luttes d’influences internationales ont pris le pas sur la révolte originelle inspirée par les Printemps Arabes de 2011. En effet, si l’Etat Islamique semble vaincu, les divergences entre Kurdes, Turques, Chiites du Hezbollah et de l’Iran, voisins Israéliens ou Arabes, intérêts européens, américains et russes assombrissent l’avenir et tout espoir de reconstruction de l’Etat syrien.
LE CLAN DES ASSAD
Hafez El-Assad, issu de la minorité alaouite proche des Chiites, conserve une ligne politique socialiste mais il encourage le développement du pays en nationalisant les secteurs les plus rentables pour réinvestir dans la construction des infrastructures indispensables à la modernisation de l’économie. Encouragé par ses voisins, il commet la même erreur que ses prédécesseurs en se lançant dans un troisième conflit contre Israël en 1973. Il perd alors le contrôle du plateau du Golan, véritable château d’eau de la région, indispensable pour les cultures irriguées des plaines du Sud de la Syrie. Son régime devient alors de plus en plus autoritaire pour ne pas perdre le contrôle des nombreuses minorités qui peuplent le pays et pour faire face aux revendications des sunnites majoritaires dont le poids est notamment renforcé par la présence de milliers de réfugiés palestiniens.

H. Assad
Mosquée Omayyad – travailleurs – 2013
C’est d’ailleurs ce déséquilibre qui déclenche la guerre dans le Liban voisin en 1975. Hafez El-Assad intervient pour défendre les intérêts syriens et chiites mais les relations se dégradent avec les voisins irakiens et turcs notamment à cause des projets de barrages sur l’Euphrate et du conflit qui oppose le gouvernement sunnite de Saddam Hussein à l’Iran chiite de l’ayatollah Khomeini qui exerce une grande influence sur les chiites syriens et libanais du Hezbollah. Les gouvernement occidentaux soutenant alors Saddam Hussein, le président Assad, favorable à l’Iran, entraîne la Syrie dans un relatif isolement dont seuls les Soviétiques tirent profit en consolidant leur présence militaire issue d’un accord signé en 1971. Les relations se réchauffent au début des années 90 car l’URSS s’effondre, Saddam Hussein est devenu le nouvel ennemi après son invasion du Koweït et seule la Syrie semble en mesure de mettre fin au conflit libanais qui dure depuis 15 ans. Le régime autoritaire du président Hafez El-Assad redevient alors fréquentable et l’économie peut enfin décoller. Le clan Assad profite alors largement des nouveaux investissements étrangers et de l’ouverture du commerce des produits syriens en accaparant la moitié des entreprises et donc des richesses du pays. Le PIB progresse mais le niveau de vie des Syriens est encore médiocre et les libertés individuelles sont pratiquement inexistantes.

L’espoir renaît avec l’arrivée au pouvoir de Bachar El-Assad le 17 juillet 2000. Ce dernier n’étant que le deuxième fils du dictateur, il n’était pas vraiment destiné à régner sur le pays. Il a donc eu une éducation « normale » et se destinait à l’ophtalmologie. Très humble et très discret, il a fait ses études à Londres où il a rencontré sa charmante épouse Asma Al-Akhras, une Britannico-Syrienne sunnite dont la beauté et la gentillesse contribuent à la popularité du couple présidentiel. Son frère aîné ayant perdu la vie dans un accident de voiture en 1994, il se prépare alors à prendre la succession de son père et rencontre de nombreux chefs d’Etat à la fin des années 90. Tous le considèrent alors comme un homme avenant, digne de confiance et qui pourrait enfin réformer et démocratiser son pays tout en nouant de nouvelles relations commerciales et des partenariats industriels avec les Occidentaux.
Malheureusement, les espoirs populaires sont très vite déçus et Bachar El-Assad, encadré par le clan familial et le parti Baas, n’engage aucune réforme démocratique. Il souhaite cependant ouvrir l’économie de son pays aux investisseurs étrangers pour le moderniser, notamment en relançant les programmes d’exploitation du pétrole. Il entame alors quelques réformes capitalistes, contraire au programme socialiste cher au parti Baas, en autorisant l’ouverture de banques privées et en entamant des négociations avec l’OMC. Il se rapproche aussi de la Russie de Poutine en signant un accord qui, en échange de l’effacement de la dette vis-à-vis de la Russie, permet le renforcement de la seule base navale russe en Méditerranée en 2006. L’Arabie Saoudite en revanche reproche beaucoup au clan Assad d’être trop proche des Iraniens et l’assassinat de l’homme politique libanais Rafik Hariri, proche des Saoudiens et des Occidentaux, attribué aux services secrets syriens, accentue les tensions régionales. Les instances internationales font pression sur le gouvernement syrien pour qu’il se retire définitivement du Liban et qu’il collabore avec les enquêteurs de l’ONU. La République de Turquie, les monarchies sunnites du golfe et certaines puissances occidentales souhaitent alors encourager un changement de régime « démocratique » qui chasserait les Assad du pouvoir au profit de la majorité sunnite. Le Président français, Nicolas Sarkozy, préfère encourager le développement de nouvelles relations régionales entre tous les pays bordant la Méditerranée. Pour cela, il n’hésite pas à recevoir le dictateur libyen Kadhafi puis à inviter le président Bachar El-Assad à l’occasion du défilé du 14 juillet 2008. Ce dernier apparaît alors encore comme un acteur incontournable dans les relations internationales au Proche et au Moyen Orient.
Retrouvez la partie 3/3 le 10 décembre 2018
Article rédigé par Eduardo Gurgel